Pourquoi ais-je étudié la philosophie? Bonne question pour Platon le platonicien. En fait, Platon n'était pas platonicien; seulement ses disciples.
J'ai parcouru le corpus philosophique pour sa connaissance pure et appliquée qu'elle proposait. Par le fait même, je voulais réfléchir sur toutes les interrogations du monde et sur tous ses problèmes impliqués. Je désirais discuter sur tous les sujets. Je cherchais à devenir un savant d'une grande polyvalence. Bref, je prétendais devenir un philosophe.
J'ai tant recherché à expliquer les causes premières, la réalité absolue, les fondements des valeurs humaines et les difficultés inhérentes qui y sont reliées. J'ai souhaité de tout coeur trouver les principes généraux qui régissaient les éléments particuliers de l'univers connu et inconnu.
J'ai étudié avec passion les présocratiques et leurs théories sur la formation physique du cosmos, Socrate et son appétit sans fin pour la vérité, Platon et son monde des idées sur lequel la matière se moule, Aristote et sa métaphysique, Diogène le chien cynique et sa désinvolture devant l'absurdité de la vie de ses concitoyens, Épicure et sa recherche du bonheur par la pratique de l'ataraxie, Épictète et son impassibilité devant le malheur, Sénèque et ses observations judicieuses à l'égard de la brièveté de la vie, les scolastiques et leurs spéculations sans fin sur les entités invisibles, Descartes et son "Je pense donc je suis", Spinoza et sa quête d'expliquer Dieu dans toutes ses parties, Hobbes sur l'origine de la société civile, Voltaire et son combat contre le fanatisme religieux, Pascal et ses maximes sur la place de l'homme dans la création, Rousseau sur la réforme du contrat social, Kant et ses impératifs catégoriques, Marx et son explication de l'exploitation des individus par la bourgeoisie trop bien nantie, Nietzche et son désir de voir advenir le surhomme anti-chrétien, Kierkegaard et son périple exploratoire dans le domaine de l'angoisse et du désespoir, les Frege, Russell et Whitehead et leur philosophie analytique, et les grands Husserl, Hegel et Heidegger qui tentent d'expliquer l'être par ses modalités phénoménales.
J'aurais pu vous parler aussi de Sartre, Camus, Jung, Freud, Schopenhaur et bien d'autres. J'aurais pu vous faire la nomenclature des courants philosophiques que j'ai étudiés. Mais le plus important c'est cette satisfaction d'être devenu entièrement disposé à tous les sujets imaginables dont on peut délibérer. J'ai gagné une telle force analytique qu'il m'est désormais facile d'émettre une synthèse sur un thème proposé. Certes, j'ai encore des opinions qui résultent d'un jugement expéditif et, heureusement, je fais peu de cas du désaccord produit. Mais cela ne m'empêche pas de continuer de réfléchir sérieusement à d'éventuelles solutions philosophiques sur des énigmes existentiels toujours non-élucidés.
Sans prétention, un étudiant de philosophie, même avec seulement un baccalauréat et une demi-maîtrise, a un regard intellectuel bien différent de celui du commun des mortels. Les réalités politiques, morales, physiques et sociales prennent un tout autre sens. Les explications émises en deviennent presque invraisemblables et on devient soi-même sceptique vis-à-vis ses propres réflexions. Le découragement n'est jamais trop loin lui non plus puisque les amis les plus proches restent dubitatifs en présence de pensées si peu conformes. Pourtant, je me dois de continuer de philosopher. Pourquoi? Par simple amour de la vérité. Parce que je veux apprendre à bien vivre. Parce que je veux savoir qui je suis, où je vais et d'où je viens avant de mourir.
"C'est proprement avoir les yeux fermés sans jamais tâcher de les ouvrir que de vivre sans philosopher." René Descartes
P.S.: Moi lorsque j'étais philosophe jusqu'à la chevelure et la barbe.
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