Par chapitres successifs intitulés « Daniel 1,1 » jusqu'à « Daniel 1,28 » - ce qui, à l'évidence, constitue un clin d'œil aux repérages bibliques - le personnage central raconte les étapes de sa vie adulte avec ses conceptions du monde et ses états d'âme ; le livre s'achevant sur le récit de vie de Daniel25 qui sert d'épilogue.
Comique professionnel à la fin du XXe siècle, Daniel 1 exploite la provocation dans des sketches sur Palestiniens et Israéliens, sur l'Opus Dei et la mafia ou sur la pornographie et les lolitas, ce qui le conduit au succès et à la fortune. Lucide et cynique, il parle de lui comme du « Zarathoustra des classes moyennes » (p. 412), précisant page 164 : « si l'on agresse le monde avec une violence suffisante, il finit par le cracher, son sale fric ». Daniel1 échoue dans ses liaisons avec Isabelle puis avec Esther et ne trouve pas non plus d'exaltation dans une sexualité hygiénique.
De plus en plus, il se sent accablé de « la mélancolie, l'apathie languide et finalement mortelle de générations désincarnées » (p. 440) tout en rêvant en même temps de « la possibilité d'une île » qu'éclaire, à la page 433, les derniers vers du dernier poème envoyé avant son suicide par Daniel 1 à Esther, la femme qu'il aime et qui lui échappe : « Il existe au milieu du temps/La possibilité d'une île »).
Ce désir très explicitement baudelairien d'un ailleurs, le fait regarder avec intérêt et bienveillance les concepts de la secte des Élohimites, transposition transparente des raeliens. L'auteur décrit également avec plus d'amusement que de critique le fonctionnement de la secte avec son gourou dominant sexuel, ses scientifiques convaincus et ses manipulations des adeptes comme lors de la disparition du prophète assassiné par un rival sexuel et qu'on prétend réincarné dans le jeune artiste Vincent qui va poursuivre la quête des Élohimites qui abandonnent bien sûr tous leurs biens à la secte qui leur promet l'éternité.
La secte richissime aménage en effet à Lanzarote, une île des îles Canaries au climat tempéré et égal, une ambassade pour accueillir les Elohims dont les adeptes attendent le retour qui marquera la fin des temps pour l'humanité. Ces extraterrestres créateurs de l'humanité possèdent le secret de la vie éternelle et la secte avance elle-même dans ce chemin en misant sur le clonage des élus à partir de leur ADN, ce qui offre une succession d'existences de copies conformes. Le romancier imagine la réussite du procédé puisqu'il nous propose les commentaires de Daniel25 qui évoquent des Marie22 ou des Esther31.
Lassé de son existence vide, sans objectif et sans attache, Daniel 1 se suicide, ouvrant, par une décision non définie, la porte à des réincarnations successives de néo-humains libérés par l'énergie solaire et les capsules longue durée de sels minéraux de la médiocre et pénible production énergétique de l'alimentation-digestion.
L'apologue est constitué par le récit de vie de Daniel25 qui part seul à la recherche d'une île-paradis en côtoyant sans se lier à eux des résidus de l'humanité retournés à l'âge du feu au milieu des ruines de l'an 2000. Le livre s'achève sur cette impossibilité d'une île : « Le bonheur n'était pas un horizon possible ».
La possibilité d'une île, Paris, Fayard, 2005, 485 p.
http://fr.wikipedia.org/wiki/La_Possibilit%C3%A9_d%27une_%C3%AEle
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