vendredi 5 février 2010

Initiation à une sociologie historico-critique de l’époque postmoderne (4)

Période de questions #1

- Monsieur Shplick, est-ce que la postmodernité et l’ère postindustrielle sont la même chose. J’ai entendu dans un reportage que la société postindustrielle avait supplanté l’ère industrielle. Elle mettait de l’avant le secteur tertiaire, celui dit des services; par exemple, la comptabilité, les activités bancaires et financières, l’analyse de l’information, la communication, le transport, la restauration, le bien-être des individus, etc. Bref, tout ce qui offrait des services aux citoyens était devenu prédominant dans l‘économie. D’ailleurs, le secteur des services serait devenu à cette époque le moteur économique.

- Bonne question Mademoiselle Blablabla, le secteur des services était de plus en plus prépondérant, dans l’ordre des 70% de l’activité économique des nations occidentales. Or, c’est méconnaître la place dominante qu’occupait toujours l’industrie militaire, automobile, aéronautique et d’extraction (minéraux, pétrole, etc.). La main d’œuvre était devenue obsolète et interchangeable, comprendre licenciable, de par l’hypermécanisation des différentes grandes industries. Oui, le secteur tertiaire était le plus grand employeur, donc nous étions alors dans un monde postindustriel. Mais le milieu industriel continuait de diriger le monde; les objectifs stratégiques et économiques des grands industriels recoupaient celles des états de cette époque. Les états, avec de grosses industries, n’avaient donc le choix que d’obéir aux volontés de ces dernières. Un bon exemple: vers 2009-2010, General Motor et d'autres grandes industries automobiles furent en faillite. Les gouvernements canadiens et américains n’eurent d’autre choix que de racheter à coups de milliards ces industries, sinon ces mêmes états auraient eux-mêmes couru à la faillite. Certes, ils ont sauvé également des entreprises du secteur tertiaire, comme celles des banques et du domaine de l’assurance. Toutefois, les grandes industries continuaient d’avoir leur place dans l’économie, et je dirais même une place prépondérante. Dans un second ordre d’idées, le terme de société postmoderne est à privilégier à société postindustrielle parce qu’on analyse en premier lieu la mentalité des gens de cette époque. Les gens vivant durant cette période de l’histoire se voyaient comme en opposition au passé, en opposition à la mentalité de leurs ancêtres dit modernes. Vous n’êtes pas sans savoir qu’on s’attarde davantage dans ce cours à la mentalité, c’est-à-dire, à l’analyse de la psychologie des postmodernes plutôt qu’à leur mode de production. Cependant, je répond affirmativement à votre question, les époques postmoderne et postindustrielle sont la même chose. On privilégie toutefois le terme “postmoderne” puisque celui-ci englobe davantage de réalités sociologiques qu’à celui de postindustriel.

- Monsieur Shplick, je ne sais si ma question est pertinente, mais pourriez-vous me dire comment les postmodernes n’ont point été capable de voir venir leur propre fin. Je veux dire, il devait bien y avoir des indices. Je pense entre autre qu’une société qui sait vivre avec plus de 25 000 ogives nucléaires entre ses mains doit, un tant soit peu, sonner l’alarme devant une telle situation.

- Mademoiselle Poupou, il n’y a pas de mauvaises questions; il n’y a que de mauvaises réponses. Ha!Ha! Blague à part, il y avait bien quelques marginaux et groupuscules qui sonnaient l’alarme. On pourrait nommer Greenpeace, l’ONU et plusieurs autres organes institutionnelles qui militaient directement ou indirectement contre les armes nucléaires. Il y avait aussi des citoyens qui, à titre individuel, discouraient sur le sujet. Il faut savoir aussi que les statistiques et les rapports sur les conséquences de l’armement nucléaire étaient du domaine public. Mais à peu près personne ne réagissait. Tout le monde continuait son petit train-train. Les historiens et sociologues en sont venus à émettre l’hypothèse que les postmodernes ne croyaient pas vraiment à la possibilité d’une destruction totale par une guerre thermonucléaire globale. C'était une chose inconcevable à toute fin pratique. Ils croyaient tous candidement au dialogue et à la démocratie; nous reviendrons d’ailleurs sur ces points. Mais les postmodernes étaient, en définitive, d’une grande insouciance et d’une grande naïveté. Il faut savoir également que le but premier du postmoderne n’était pas de veiller sur le sort de son prochain, ni même sur son propre sort; le but premier du postmoderne était de s’amuser et de vivre à fond. S’il pouvait trouver un exutoire, et ce, quel qu’il soit, le postmoderne l’exploitait même si cela allait au détriment d’autrui. Vous allez voir lors des prochains cours à quel point le postmoderne était déconnecté de la réalité, celle la plus tangible; il préférait, et de loin, s’enfermer dans un monde virtuel, au propre et au figuré, et s’adonner au plaisir solitaire, et ce, au propre et au figuré. Ha!Ha!

À suivre...

Image: Post Industrial Pittsburgh, acrylique 28x40, 1992, Collection Pennsylvania State Museum

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